Leur fils est mort à cause du jeu du foulard : ils veulent briser le tabou
Leur fils, Gabriel, est décédé le 13 novembre 2024 à l’âge de 13 ans et demi. Il a succombé après s’être livré au jeu du foulard, chez lui, à Nantes. Julien et Nadia, ses parents, témoignent afin de briser le tabou et dans l’espoir que ce drame ne frappe pas d’autres familles.
Un témoignage publié le 31 janvier 2025 sur le site de Ouest-France
Dans la bibliothèque familiale, les photos de Gabriel et sa sœur Charlie, souriants, racontent la vie d’avant. Mercredi 13 novembre 2024, Julien Serot et Nadia Ropert ont perdu leur fils aîné brutalement. Gabriel, âgé de 13 ans et demi, est décédé après s’être livré au « jeu du foulard », dans sa chambre. Ce soir-là, il s’est accroché avec son pantalon à une barre de son lit cabane. Simplement assis sur son lit, il s’est asphyxié, en quelques minutes. Ses parents, qui étaient présents l’ont découvert une heure après, en allant se coucher. Il était déjà trop tard. Ils ont pratiqué les gestes de premier secours, avant que médecins et pompiers ne prennent le relais immédiatement pour tenter de le réanimer, en vain. Le cœur de Gabriel s’était arrêté.
Anéanti, ce couple de Nantais trouve la force et la dignité de témoigner aujourd’hui, deux mois après le drame, dans l’espoir « que cela n’arrive plus ». Aucun des deux ne savait que leur fils pratiquait ce jeu dangereux. « Si on avait su…, articulent-ils doucement, sous le poids d’une culpabilité dont ils ne peuvent se défaire, on aurait pu repérer les signes. » « Le mercredi précédent, il n’avait pas pu aller à son cours de piano après le badminton, parce qu’il avait très mal à la tête. » Une autre fois, ils aperçoivent une trace sur le cou de leur fils. « Il nous a dit que c’était en rangeant les filets de badminton. » Un soir, Nadia Ropert retrouve un pantalon dans son lit. Julien Serot s’interroge aussi sur ces quelques instants où Gabriel s’était éclipsé avec ses copains derrière le gymnase et en était revenu « joyeux ».
Comment interpréter des signes pouvant paraître anodins quand on n’a pas été alerté ?
« Les personnes qu’il faut d’abord sensibiliser, ce sont les enfants. Ils ne savent pas ce qu’ils risquent en jouant à s’asphyxier. Ils n’ont pas conscience qu’ils peuvent en mourir. » Julien Serot et Nadia Ropert ont reçu un écho favorable du collège de Chantenay, où leur fils était scolarisé. Une formation pour les élèves et une conférence pour les adultes ont été mises en place avec l’association Apeas (Accompagner prévenir éduquer agir sauver). « Si Gabriel avait eu cette séance de prévention, il serait là, aujourd’hui, avec nous, ajoute Nadia Ropert, la voix brisée. C’est tellement violent. »
Une enquête de police a été menée, comme le prévoit la procédure, avec pour but de vérifier les causes de la mort et d’écarter des hypothèses. Suicide, ou intervention d’un tiers… « Gabriel n’a rien inventé. C’est un process qui se transmet de génération en génération. Notre petit garçon a été piégé par ce jeu. » Julien Serot et Nadia Ropert se posent encore beaucoup de questions : comment et dans quel cadre leur fils pratiquait-il ce jeu – qui s’exerce d’abord en groupe – et comment avoir des clés de compréhension pour avertir et protéger les autres enfants ?
Aucun des deux parents n’avait jamais joué à ce jeu enfants. Julien en avait simplement entendu parler. La moitié de leurs amis leur ont confié, depuis, l’avoir pratiqué à l’école.
Le blondinet aux cheveux longs qui sourit dans la bibliothèque était un garçon joyeux et curieux, aimant lire. Il était sportif, passionné de badminton, à l’aise au collège. « Le plus dur, c’est de vivre avec l’absence et encore, on a du mal à se la représenter. » Il n’y a pas de profil, tout enfant peut s’adonner au jeu du foulard, à l’âge où l’on tente de nouvelles
expériences et où l’on se croit invincible. Garçons et filles de tous milieux sont concernés.
Même si les décès concernent plus les garçons.
Comment trouver du sens à une vie qui n’en aurait plus ? Leur fille, Charlie, âgée de 11 ans,
en 6ème dans ce même collège et qui doit constamment être rassurée depuis, les aide à tenir.
« Notre fille pensait que les enfants, ça ne pouvait pas mourir. » Julien Serot et Nadia
Ropert aimeraient tellement voir cesser cette pratique qui tue. Gabriel aurait fêté ses 14 ans
dans quelques jours, le 12 février.